Après les Législatives, quelle politique en Touraine ?

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3 députés du camp présidentiel et 2 députés du Nouveau Front Populaire. 4 hommes et une femme pour représenter le département au Palais Bourbon. Voilà le bilan des élections législatives anticipées de 2024 en Indre-et-Loire. A l’échelon départemental, la gauche a gagné un siège et le centre en a perdu un, épousant la dynamique nationale avec une nette régression des parlementaires Macronistes. Mais ce n’est là qu’un enseignement à chaud. Derrière l’arithmétique, on a voulu pousser plus loin et se demander quelles traces peut laisser ce scrutin inopiné à l’ambiance si particulière.

Emmanuel Macron a au moins réussi une chose. En prononçant la dissolution de l’Assemblée Nationale le 9 juin, le chef de l’Etat est parvenu à ramener la population dans les bureaux de vote. Lors des élections européennes, 237 987 enveloppes ont été ouvertes en Indre-et-Loire… 304 989 lors du 2e tour ce dimanche 7 juillet soit presque autant que lors du 1er tour le 30 juin (304 728 voix).

La progression est spectaculaire : 67 000 personnes en plus dans les isoloirs, alors que ces derniers temps les scrutins législatifs peinaient à passionner les foules. Ainsi, en 2022, le second tour des Législatives n’avait mobilisé que 215 856 personnes en Touraine, donc 22 000 de moins qu’aux Européennes, et 89 000 de moins de moins que pour le scrutin qui vient de s’achever, ce qui représente 20% du corps électoral départemental.

Ce chiffre s’explique notamment par un point : pour une fois, les Législatives avaient un vrai enjeu. Depuis 2002, elles se déroulaient juste après la Présidentielle entraînant en général une confirmation du vote précédent pour offrir une majorité au chef de l’Etat. Là, Emmanuel Macron avait ostensiblement demandé une clarification de la situation politique par son geste. Et il aurait été difficilement entendable qu’une population qui se plaint régulièrement de ne pas être assez écoutée ne profite pas de l’occasion pour s’exprimer.

De fait, on voit bien que quand l’enjeu est moindre, cela fait monter l’abstention. Sur la 1ère circonscription qui englobe quasiment toute la ville de Tours, l’écologiste Charles Fournier a fait 45% au 1er tour avec 10 000 voix d’avance sur son concurrent macroniste Benoist Pierre et le RN a été éliminé car sa candidate Lisa Garbay n’a pas recueilli assez de voix pour se maintenir. Un candidat très loin devant + pas de Rassemblement National à qui il faudrait faire barrage = 5 points de participation en moins, soit 3 000 personnes qui ont boudé les urnes en une semaine, auxquelles il faut ajouter les bulletins blancs supplémentaires en 7 jours ce qui est également conséquent.

En revanche, dans les 4 autres circonscriptions tourangelles, la présence du RN au second tour a maintenu l’enjeu. Une victoire de l’extrême droite sur l’un de ces territoires aurait été une première, perspective motivante pour ses soutiens et stressante pour ses adversaires souhaitant lui faire barrage. Résultat : une abstention quasi identique par rapport au premier tour, chaque fois autour de 30%, par ailleurs inférieure à la moyenne nationale.

Est-ce à dire que la population se réintéresse à la chose politique ? Ça, c’est une bonne question. Et ce serait prématuré de répondre par l’affirmative. Un regain de participation ne suffit pas pour tirer cette conclusion. Déjà parce qu’on a quand même un tiers du corps électoral qui continue de bouder les urnes, ce qui est énorme. 140 000 personnes en Indre-et-Loire, soit plus que le nombre d’habitants de Tours.

Ensuite, la frange de la population qui assiste aux rendez-vous politiques (réunions publiques, meetings) c’est beaucoup de personnes âgées, ou le cercle militant. Sauf peut-être pour le Nouveau Front Populaire qui a su faire une campagne de terrain assez pop et plutôt novatrice, lui ramenant peut-être un peu plus de monde hors du premier cercle. La salle des fêtes de l’Hôtel de Ville de Tours était également bien remplie pour le dernier meeting de Benoist Pierre.

Alors comment capter les abstentionnistes récidivistes ? Comment garder celles et ceux qui sont revenus vers les urnes en 2024 (les Européennes ont aussi été marquées par une hausse de participation comparé aux derniers scrutins du genre) ? Une communication décalée et rajeunie ne suffira pas. Il faudra avant tout que la nouvelle Assemblée Nationale soit digne, c’est-à-dire qu’elle mette fin au brouhaha incessant des dernières années pour se concentrer sur le débat d’idées respectueux, qui puisse permettre de voter des textes faisant vraiment avancer les choses.

Lors d’un entretien avec 37 degrés avant le second tour, le Macroniste Daniel Labaronne – réélu sur l’Amboisie – rappelait que 70 textes ont été votés au parlement depuis 2022, alors même qu’il n’y avait pas de majorité absolue. Combien y’en aura-t-il lors des prochaines mandatures ? Est-ce que ça se fera dans une ambiance constructive ou conflictuelles, voire assourdissante ? Sur le terrain, en Touraine, il faudra aussi montrer de l’ouverture, de l’écoute, de l’adaptation, de la mesure. Ne jamais oublier que c’est facile de dégringoler dans l’estime mais très difficile de remonter.

Avec leur vote, les Tourangeaux, comme les Français, ont indirectement donné une mission aux députés : montrez que vous êtes plus forts que les appareils, que les postures. Montrez-nous qu’on peut donner une dernière chance à la politique des idées. Sinon ? Sinon la dynamique d’extrême droite du premier tour pourrait bien, cette fois, ne pas régresser au second. On a bien vu que ce n’était pas une menace en l’air puisque même avec une forte mobilisation, le RN était très fort le 30 juin. Qu’on ne se méprenne pas : notre peuple sait très bien se faire entendre.

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